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Tannabelle et ses grumeaux

   
"Livre-lui tes pensées. Des pensées que tu ne dis pas, ce sont des pensées qui pèsent, qui s'incrustent, qui t'alourdissent, qui t'immobilisent, qui prennent la place des idées neuves et qui te pourrissent. Tu vas devenir une décharge à vieilles pensées qui puent si tu ne parles pas."
Oscar et la dame rose - Éric-Emmanuel Schmitt
   
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26 juillet 2014

Vacances... terminées !

Cet été, nous ne sommes pas partis en vacances, congé parental oblige : c'est pas payé bien lourd, ce truc-là ! ;-)
Cela dit, nous le savions avant que je ne le prenne. Et puis il n'aura duré que 15 semaines et nous avions quelques économies qui nous ont permis de voir venir pendant cette période-là.
Depuis le 16 juillet, je ne suis donc plus en congé parental mais en congés payés - jusqu'au 23 septembre inclus. J'avais fait un calcul (trèèèès) savant entre mes congés 2012-2013 restants et mes congés 2013-2014 acquis pour reprendre le travail quelques jours après l'entrée à la crèche de Gaspard et pour ne surtout pas reprendre le 18, le 19 ou le 23 septembre.

Aux destinations lointaines et/ou exotiques, nous avons donc préféré un terrain connu, composé :

  • de longues plages de sable fin,
  • d'une météo toujours agréable pour peu qu'on sache voir à travers les nuages (c'est une qualité que l'on acquiert forcément quand on a un enfant au ciel),
  • d'autochtones accueillants,
  • d'une gastronomie locale gourmande et
  • d'un envahissement touristique raisonnable.

À travers cette carte postale invitant au voyage, vous avez évidemment tous reconnu... la Côte d'Opale ! :-)

 

Même si nous ne sommes partis ni loin ni longtemps, nous avons vécu ces quelques jours à un autre rythme et ensemble - à quatre, presque.

Lundi, nous avons fêté notre anniversaire de mariage. Il y a eu des larmes, forcément. Parce que la famille que nous avions imaginée il y a 7 ans ne ressemblait vraiment pas à ça.

Mardi, nous sommes allés au cimetière pour planter deux petits arbustes persistants dans la jardinière permanente de la tombe d'Élise, dont le monument et la stèle avaient été terminés deux mois plus tôt.

Tombe 20140724 1 Tombe 20140724 2
Je n'aurais jamais pensé dire ça un jour mais ce que "j'aime" dans la tombe d'Élise, c'est qu'on croirait qu'elle a croqué un bout de nuage.

Jeudi, nous sommes allés à la plage avec Gaspard. C'était un vrai bonheur de le voir gambader à quatre pattes dans la rivière d'eau de mer tracée par la marée descendante.

Ombres sable Sable Stella

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26 juillet 2014

Symptômes

Nous saurons avec l'échographie prévue dans quelques jours si le haricot est toujours là et comment il va pour l'instant. En attendant, quelques indices me laissent penser que je suis toujours enceinte.

Comme l'an dernier, ce début de grossesse est placé sous le signe de la fatigue. Mais, à la différence de ma première grossesse, grasses mat' et siestes ne sont plus vraiment au rendez-vous avec un crapaud sur lequel veiller :-)

Il semblerait également que ma poitrine se prépare à un nouveau changement.

Et surtout, mes "envies de fraises" commencent à ressurgir.
La première de cette nouvelle grossesse, c'était hier.
Il était un peu plus de 9 heures du matin.
Gaspard dormait encore.
Mon homme et moi nous apprêtions à petit-déjeuner.
La table était mise.
Le café coulait. Le lait chauffait. Le beurre ramollissait.
Le pot de Nutella attendait qu'on lui règle son compte une bonne fois pour toutes.
Et c'est là que j'ai été prise d'une irrésistible envie de... sauce au poivre !
Pas d'un bon morceau de viande grillée assaisonné d'un peu de sauce au poivre.
Non, de sauce au poivre tout court, sans rien à assaisonner.
De sauce au poivre à dévorer déguster à la petite cuiller directement dans le pot.
Et pourtant je me suis retenue.
Mais je me suis vengée le soir en savourant de la sauce au poivre assaisonnée de saucisses au barbecue. Non mais !

Sauce au poivre

24 juillet 2014

Les experts Europe 1 - Psychiatre, psychanalyste, psychologue... lequel choisir ?

Audio

Certains vont finir par croire que c'est une habitude : je suis encore (!) passée à la radio, hier après-midi.

Il s'agissait donc, cette fois encore, de l'émission "Les experts Europe 1", sur la radio du même nom. L'émission d'hier avait pour thème "Psychiatre, psychanalyste, psychologue... lequel choisir ?". J'avais commenté la veille sur leur page Facebook et mon commentaire a retenu l'attention de l'équipe de rédaction.

Après la présentation du sujet par Roland Perez (animateur par interim pendant les vacances de l'animatrice "titulaire" Héléna Morna) et un court extrait musical, j'ai été la première auditrice à intervenir, à partir de 6 minutes 26 secondes.
Après mon intervention suivie du rappel du thème du jour, Roland Perez a enchaîné en commentant mon témoignage, notamment avec des mots qui m'ont touchée tout simplement parce qu'ils étaient justes : "un véritable traumatisme", "elle a perdu [...] un enfant".

Vous pouvez réécouter l'émission dans son intégralité ici :

11 juillet 2014

Non mais !

Ah, la CAF ne veut pas que ma fille rentre dans ses cases ?! Ben je m'en fiche, moi je l'y fais rentrer quand même !

Ça ne change rien.
Ça ne me donne droit à rien en plus ni en moins.
L'employé de la CAF va se demander pourquoi j'ai rajouté cette mention puisqu'Élise n'existe pas chez eux mais peu importe.
Je n'ai eu qu'une grossesse auparavant, je n'ai qu'un enfant à charge actuellement mais je ne peux pas laisser croire au monsieur ou à la madame de la CAF que, forcément, "une grossesse = un enfant". Non mais !

Déclaration de grossesse 1

 

Et comme je vous aime bien, je vous offre un petit bonus. À vous de trouver l'intrus !

Déclaration de grossesse 2

11 juillet 2014

Troisième

Pour Élise et Gaspard, on avait fait ça "en grand". Cette fois, on fait les choses différemment.

 

Mais de quoi parle-t-elle ?! (#1)

Mais de quoi parle-t-elle ?! (#2)

Mais de quoi parle-t-elle ?! (#3)

 

Ça, c'était juste pour l'annonce mais je vous reparlerai bientôt de tout ce que ça implique...

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30 juin 2014

Prénatalités

Vidéo

Documentaire diffusé sur Arte
Date : 27 juin 2014
Durée : 53 mn
23 juin 2014

Psychiatre - Non-épisode 4

Lors du dernier rendez-vous avec la psychiatre, auquel mon mari a assisté, j'ai eu le sentiment de tourner en rond : rien de nouveau n'a été dit ni envisagé. C'est pourquoi je n'y ai pas consacré de billet spécifique, contrairement aux deux premiers.

Je crois que le discours de mon mari l'a rassurée. J'ai pourtant l'impression qu'il n'a fait que répéter ce que je lui avais déjà dit moi-même mais sans doute qu'une nouvelle fenêtre sur ma vie et mon état lui aura permis d'avoir plus de certitudes sur moi.
Elle est toutefois restée sur son idée de traitement, sans chercher à me l'imposer pour autant.

Nous étions convenues de nous revoir la semaine prochaine, elle et moi. Mais depuis deux semaines, j'ai compris que ces rendez-vous me font plus de mal que de bien, ne m'aident pas et auraient plutôt tendance à me faire replonger.

J'ai donc décidé d'une part de ne pas prendre de traitement anti-dépresseur, d'autre part de carrément arrêter de voir cette psychiatre. Je me contenterai de nos rendez-vous avec la psychologue.

Je viens de lui expliquer ma décision par téléphone.
Je me sens soulagée. Comme si mon deuil redevenait normal, comme si je reprenais un semblant de contrôle dessus.

19 juin 2014

Le jour et la nuit

Après les derniers billets un peu plombants, place à un billet plus léger ! Du plombant, du léger : c'est comme ça que je reste les pieds sur terre et la tête dans les étoiles ! ^^

Je suis fière de vous annoncer que Gaspard utilise désormais 100% de couches lavables, le jour comme la nuit !
Idem pour les lingettes : des lavables colorées pour les fesses et des lavables beiges pour le visage, histoire de limiter les risques d'inversion (dans un sens, ça passe ; dans l'autre c'est moyen ! ;-))
Résultat : les produits jetables pour Gaspard se limitent donc désormais aux coton-tiges pour les narines et les oreilles (je n'utilise pas le même pour ces deux endroits, rassurez-vous !) et à quelques couches en dépannage en cas de retard de lessive notamment.

Quelles couches lavables ?

Cela fait déjà quelques mois que le tout lavable a été mis en place la journée ; pour la nuit, c'est un peu plus récent mais tout aussi concluant et le système est le même.

Il existe de nombreux systèmes de couches lavables et j'avoue que je suis loin d'être une experte. Au moment de me lancer, je n'ai pas écouté LE conseil que j'ai retrouvé partout : louer plusieurs systèmes et modèles avant d'investir dans celui qui convient.
J'ai trouvé un site qui m'a inspiré confiance (http://www.lulu-nature.com) et j'ai choisi le système qui m'a le plus convaincue : couche + culotte de protection (également appelée surcouche).

Couche de jour                                   Couches de nuit                                       Surcouche
Couche diurne Couche nocturne Culotte de protection

Je parlais déjà de couches lavables avant de tomber enceinte ; je pense que j'aurais donc tenté l'expérience même avec un congé maternité pour un seul bébé et même sans congé parental. Mais ces quelques mois entre l'arrivée des grumeaux et ma reprise du travail prévue pour septembre m'ont donné le privilège de pouvoir prendre mon temps pour passer du jetable au lavable.
J'ai donc eu tout le loisir d'attendre avec patience et abnégation que les couches lavables atteignent leur capacité maximale d'absorption après une dizaine de lavages en machine.

Et le porte-monnaie, il va comment ?

Bien, merci - même si la fin du congé parental mi-juillet et donc le retour à une rémunération (et non plus une indemnisation) seront les bienvenus :-)
Trêve de plaisanterie, l'un des arguments en faveur des couches lavables est que leur coût de revient - des premiers mois à la propreté, et lessives incluses - est inférieur à celui des couches jetables. J'ajouterai un seul bémol : la facture finale est certes moins douloureuse avec les couches lavables mais il faut tout de même avoir les moyens d'investir d'un coup ou presque. A titre d'exemple, le jeu complet de Gaspard a coûté autour des 700€ (couches, surcouches, sacs à couches pour les sorties, seau à couches).

En résumé, le choix du système de couches, c'est comme l'achat d'une maison : les jetables, c'est un crédit à la banque (en l'occurrence, c'est surtout la planète qui paie sans jamais être remboursée, à mon avis) et les lavables, c'est un achat comptant. Pour la maison, on a dû demander au banquier ; pour les couches, on a pu investir tout de suite.

Et les lessives, justement ?

Cette première étape passée, il m'a fallu trouver, après quelques tâtonnements, le mode de fonctionnement idéal pour les lessives. Au début, je lavais les couches et les culottes de protection ensemble. J'essayais toujours d'anticiper un peu pour avoir au moins un ou deux jeux d'avance pendant le lavage/rinçage/essorage/séchage mais je me retrouvais vite coincée. J'ai donc trouvé trois parades qui m'ont donné toute satisfaction :

  • investir dans quelques couches et culottes supplémentaires pour avoir plus de latitude dans les tournées de linge (au final, mon stock se compose de 18 couches, 9 culottes petite taille et 9 culottes grande taille pour plus tard - de mémoire, c'est la quantité souvent recommandée sur les différents sites et forums),
  • laver les couches séparément du reste du linge de Gaspard avec lequel je lave désormais également les culottes,
  • quand c'est possible, réutiliser les culottes une fois avant de les laver en alternant avec une propre un change sur deux : Gaspard a sur les fesses une couche propre à chaque fois et une culotte propre une fois sur deux en moyenne, le temps que la culotte déjà utilisée une fois s'aère.

Depuis que j'ai adopté ce système, ça tourne et les ruptures de couches ou culottes propres sont rares. Evidemment, les couches lavables impliquent quelques lessives supplémentaires mais elles se limitent à trois par semaine, maximum. Vraiment pas la mer à boire quand on est convaincu de leurs bénéfices !

Et ce qui est top, c'est que le papa joue le jeu sans rechigner ! :-)

Et la nuit, alors ?

La première nuit où tu tentes la couche lavable, je te conseille vivement de ne négliger aucun détail. Sinon, voici ce qui risque de t'arriver :

1. te lever à 2h du matin, la tête pas franchement à sa place,
2. te rabattre sur une couche jetable parce que :

  • tu n'as pas encore compris ta boulette,
  • tu te dis bêtement (soyez indulgent : rappelez-vous qu'il est 2h du matin !) que la production nocturne de la vessie de ton enfant est tout simplement supérieure à la capacité d'absorption de la couche en question,
  • tu n'as pas envie de te lever trois heures plus tard pour le changer à nouveau.

3. lui mettre un body, un pyjama et une gigoteuse propres,
4. te rendormir,
5. te réveiller en te disant que c'est bien dommage d'avoir investi dans des couches lavables "spécial nuit" si ton bébé est un gros pisseur,
6. mettre trois semaines à te laisser séduire par l'idée de retenter l'expérience nocturne, de peur de casser ses loooooongues nuits de 14 heures (et ton sommeil à toi aussi - sans parler de celui de ton mari qui bosse, lui),
7. vérifier sur le site où tu as acheté les couches que tu as bien respecté toutes les précautions d'usage,
8. te rendre compte que tu as bien lavé les couches plusieurs fois avant d'y glisser ton bébé afin qu'elles atteignent plus rapidement leur capacité maximale d'absorption,
9. mais surtout te rendre compte que tu as juste oublié la culotte de protection entre la couche et le body.

 

Lessive de couches
Quand je ne sais pas quoi faire de Gaspard, je l'installe devant
une tournée de couches et je suis tranquille pour deux heures !
;-)

Et pour ceux qui se poseraient la question, les couches lavables auraient été adoptées même si Élise avait été là.

3 juin 2014

Ce que je ne supporte pas

Je savais que mon dernier billet ferait réagir mais je ne pensais pas que ce serait à ce point-là.

Je ne veux blesser ou offenser personne à travers ce nouveau billet. Je veux simplement expliquer ce qui m'aide et ce qui ne m'aide pas, par rapport à la psychiatre, mais pas seulement. Je sais que chacun des conseils et avis que j'ai reçus est guidé par la bienveillance et l'affection mais je vous assure que ça ne m'aide pas.

 

Je ne supporte pas qu'on me dise que nous avons pris la bonne décision pour Élise, que nous avons bien fait, comme si on balayait d'un revers de la main les doutes et les questions qui nous ont assaillis et qui nous assaillent encore, comme si la décision qu'on a prise était une évidence, comme si la vie d'Élise valait si peu qu'on peut la nier en quelques mots à peine, comme s'il suffisait de jouer à se faire peur en faisant semblant de se poser la question pour trouver la réponse.
Mon mari et moi avons, nous aussi, joué à nous faire peur au début de ma grossesse, avant que notre vie ne bascule. Comme beaucoup de parents, nous nous sommes posé ce qui nous semblait alors être "la" question : et si notre enfant est trisomique ? Chacun de nous avait sa réponse toute prête, qui n'était pas la même. Et puis la réalité nous a rattrapés. Ce n'était pas la trisomie, c'est vrai, mais nous avons dû nous poser la question pour de vrai et surtout trouver une réponse.
Chacun peut avoir ses a priori mais je vous jure - et je parierais ma vie là-dessus - que personne ne peut savoir avant d'y être confronté pour de vrai. Le regard extérieur est toujours plus confortable, croyez-moi. Seuls ceux qui se sont posé la question pour de vrai - quelle qu'ait été leur décision d'ailleurs - peuvent prétendre comprendre.

 

Je ne supporte pas qu'on juge à notre place du meilleur moment où nous pourrons concrétiser notre nouveau désir d'enfant. Certains nous sentent prêts ; d'autres nous conseillent d'attendre avant de relancer les essais bébés. Alors qui écouter plus que l'autre et pourquoi ? Mon mari et moi sommes les seuls à savoir si le moment est venu.

 

Je ne supporte pas que les gens - des inconnus, des connaissances - croient que je vais "mieux", voire "bien", uniquement parce que je souris devant eux. Croient-ils que le chagrin me fait oublier toutes les règles de savoir-vivre et de civisme ? Croient-ils que c'est devant eux que je vais m'effondrer ? Croient-ils que c'est à eux, que je connais si peu et qui croient détenir la vérité sur le deuil que nous avons à faire, que je vais confier mon mal-être et mes doutes ?

 

Je ne supporte pas qu'on me conseille ou déconseille de prendre un traitement anti-dépresseur, sous couvert d'une quelconque expérience. Ça fonctionne pour elle, ça n'a pas marché pour lui, ça a fait pire que mieux pour elle ? Et alors ?! Chaque situation de vie où l'opportunité d'un traitement anti-dépresseur est apparue avant d'être confirmée ou rejetée est différente. Les conseils que j'ai reçus dans un sens ou dans l'autre émanent de personnes confrontées à des situations différentes. Parce que chacun prend le chemin qu'il peut et qu'il veut. Mon mari et moi avons perdu le même enfant dans les mêmes circonstances et pourtant nous n'empruntons pas tout-à-fait le même chemin. Alors, même si la question d'un tel traitement s'était posée pour ces personnes suite au deuil périnatal d'un jumeau dû à une interruption de grossesse, cela ne suffirait pas à me convaincre de suivre leur voie.

Pour l'instant, lorsque j'envisage ce traitement, je me dis qu'il pourrait peut-être m'aider temporairement, me maintenir la tête hors de l'eau jusqu'à ma reprise du travail fin septembre mais pas au-delà. Mais il restera de toutes façons artificiel.
Et puis, si je prends ce traitement, où en serai-je quand j'arrêterai ? Au même stade qu'aujourd'hui, à me torturer l'esprit, à me poser des milliers de questions, à ruminer mes propres regrets et reproches ?
Je ne sais pas si je suis en dépression ou non - je ne sais pas à quoi ressemble une dépression et il paraît que ce n'est pas l'image que je renvoie à ceux qui me côtoient fréquemment - mais ce que je sais, c'est que je suis en deuil et qu'après le traitement je serai toujours en deuil.
Je suis certaine que ce traitement ne fera que retarder les choses : il ne résoudra aucune question, il n'effacera pas le manque, il n'éloignera pas les regrets. Il mettra juste ma vie sur pause.

Je sais aussi que les premiers mois de vie d'un enfant sont essentiels à son développement mais:

  1. je ne pense pas me voiler la face en disant que Gaspard est un petit garçon bien dans ses baskets (si, si, il en a : souvenez-vous !), souriant, facile à vivre, curieux de la vie, qui joue, qui dort bien, qui rit, qui pleure (j'ai lu que les pleurs importaient autant que les rires parce qu'un bébé qui pleure, c'est un bébé qui se sent en confiance et qui sait que l'on répondra à ses pleurs) ;
  2. je me demande à partir de quel âge un enfant a le "droit" d'avoir une maman qui ne va pas bien, si ses premiers mois sont si importants. Parce que, si je prends un traitement, ce sera avant tout pour lui alors quand pourrai-je me dire "Gaspard est assez grand pour que je m'autorise à ne pas aller bien" ? Jamais, je crois. On ne juge jamais son enfant assez grand pour ces choses-là.

Je sais que mon entourage proche a confiance en moi par rapport à Gaspard. Je pense que je lui apporte tout ce dont il a besoin affectivement et matériellement - en tout cas, je ne pourrais pas faire plus ou mieux. Je crains simplement qu'il ne reçoive en plus des choses dont il n'a pas besoin. Et c'est de ça que j'aimerais le préserver.

Je crois malheureusement au fond de moi que je suis la seule à détenir les clés : aucun traitement, aucun accompagnement sous quelque forme que ce soit ne pourra faire le travail à ma place. Et ce travail qu'il me reste à accomplir se résume en quelques mots: assumer et accepter la décision que nous avons prise, arrêter de regretter.

30 mai 2014

Psychiatre - Épisode 2

Lundi dernier, j'ai à nouveau rencontré le Dr Terranova. Le calendrier a voulu que ce rendez-vous vienne conclure une semaine de dates particulières :

  • le 18 mai : l'anniversaire de mon mari, que l'on avait fêté à presque quatre en 2013 en pensant qu'on serait bel et bien quatre un an plus tard, mais aussi les huit mois du décès d'Élise,
  • le 19 mai : les huit mois des grumeaux,
  • le 23 mai : les huit mois de l'enterrement d'Élise,
  • le 24 mai : le premier anniversaire de ce jour où notre vie a basculé,
  • le 25 mai : la fête des mères où mon cœur de maman était encore plus coupé en deux.

Alors forcément, dans le cabinet de la psychiatre, on ne peut pas dire que j'étais en pleine forme.

Contrairement à ce que j'avais cru comprendre, je n'ai pas rencontré la psychologue qui devait nous accompagner à domicile ; ce nouvel entretien s'est déroulé en tête-à-tête avec le Dr Terranova.

Neuropédiatrie

Elle a rapidement vu et senti que j'allais moins bien que la dernière fois. J'ai essayé de lui donner une explication rationnelle (la succession récente de toutes ces dates) à la dégradation de mon état mais ça ne lui a pas suffi. L'entretien a beaucoup tourné autour de la culpabilité cette fois. Parce que la culpabilité vous dévore, vous ronge de l'intérieur - elle est insidieuse et s'insinue partout.

Je culpabilise d'avoir tué Élise.
Je culpabilise de ne pas toujours penser à Élise.
Je culpabilise par rapport à Gaspard. D'ailleurs, dimanche dernier - jour de la fête des mères, j'étais tellement mal que j'ai fait un énorme câlin à Gaspard au moment de le coucher. Moi-même je sentais bien que je perdais pied à ce moment-là, je l'embrassais et le caressais en repensant à Élise et à ces mêmes gestes que je n'avais pu faire que quelques fois à peine avec elle. Et comme par hasard, alors que Gaspard dort entre 12 et 14 heures, cette nuit-là, il s'est réveillé six fois - comme si je l'avais perturbé, comme si je lui avais communiqué mon mal-être, comme s'il avait absorbé ma détresse. Je sais bien qu'on peut trouver mille explications à la mauvaise nuit d'un bébé mais vous ne m'ôterez pas de la tête que j'y suis nécessairement pour quelque chose.
Je culpabilise de ne visiblement pas réussir à m'en sortir toute seule.
Je culpabilise quand je me dis que rien ne pourrait être pire que l'absence d'Élise et que cette absence est de notre faute. En même temps, peut-on commettre un tel acte sans le payer toute sa vie ?
Je culpabilise quand j'imagine qu'un accident ou une maladie pourrait laisser Gaspard dans l'état végétatif qui aurait été celui d'Élise à la naissance : et pourtant, si ça arrivait, on ne tuerait pas Gaspard alors pourquoi n'avons-nous laissé aucune chance à Élise ?

Et c'est la nature de nos échanges qui lui a fait réviser son jugement quant au traitement médicamenteux, puisqu'elle m'a avoué qu'elle se posait la question, alors qu'elle l'avait exclu lors de notre premier entretien. Je lui ai rappelé que je n'y étais pas favorable a priori, pas plus que mon mari. Elle m'a alors expliqué qu'il s'agirait de toutes façons d'un traitement léger, qui ne m'abrutirait pas et qui ne modifierait pas mon comportement.
Elle a notamment insisté sur l'importance des premiers mois de vie de Gaspard et la nécessité qu'il bénéficie d'un environnement équilibré pendant cette période de sa vie en particulier.
Elle a précisé que c'était la notion de culpabilité qui ressortait de mes propos qui l'incitait à se poser la question. Elle m'a expliqué que la culpabilité est l'un des symptômes de la dépression. Voilà, le mot est lâché - le mot qui fait peur, le mot qui fait fuir. Je lui ai demandé si cette culpabilité n'était pas normale compte tenu de la décision que nous avions prise. Elle m'a alors fait comprendre (je ne me souviens plus de ses termes exacts) que, huit mois après, ce n'était pas tout-à-fait normal.

Je ne demande qu'à la croire et qu'à être aidée. Après tout, il paraît qu'elle s'y connaît, en deuil périnatal, d'un jumeau qui plus est.

Je dois à nouveau la rencontrer dans une dizaine de jours, accompagnée de mon mari cette fois, notamment pour discuter de l'opportunité de ce traitement.

Mais prendre des anti-dépresseurs, cela implique probablement que j'interrompe la relactation (je vous en reparlerai plus tard) et que nous fassions une croix sur notre espoir d'une nouvelle grossesse dans les semaines ou mois à venir.
Toujours est-il que, si elle me propose effectivement un traitement, ce ne sera pas pour moi mais pour Gaspard que je l'accepterai. Parce que je ne veux pas qu'il souffre de mon état. Car au final, le plus difficile à encaisser au sortir de cet entretien, c'est qu'il semble que je ne suis pas tout-à-fait à la hauteur pour m'occuper de Gaspard. Et si c'est comme ça que je suis censée lâcher prise par rapport à la culpabilité, c'est mal parti...

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