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Tannabelle et ses grumeaux
   
"Livre-lui tes pensées. Des pensées que tu ne dis pas, ce sont des pensées qui pèsent, qui s'incrustent, qui t'alourdissent, qui t'immobilisent, qui prennent la place des idées neuves et qui te pourrissent. Tu vas devenir une décharge à vieilles pensées qui puent si tu ne parles pas."
Oscar et la dame rose - Éric-Emmanuel Schmitt
   
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elise
30 mai 2015

Demain

Scène (presque) ordinaire de la vie de bureau un vendredi soir.

Mon mari : Bon week-end !
Sa collègue (parfaitement au courant de notre histoire) : Bon week-end ! Et n'oublie pas Annabelle dimanche !
Mon mari : Non non.
Sa collègue : En plus, elle est doublement mère !
Mon mari : Non, triplement.
Sa collègue : ... Ah...

À force de taper sur le clou, il finira bien par rentrer !

C'est sûr, Élise ne pourra jamais me souhaiter "Bonne fête Maman !" mais je serai toujours sa mère.
C'est même elle, avant Gaspard puis Hector, qui a fait de moi une mère alors c'est dire !

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25 mai 2015

Cherchez l'erreur

Aujourd'hui, comme tous les jours, Gaspard a pris son goûter.

Aujourd'hui, c’était au grand air.
Après un bon week-end en famille dans le Nord.
Sous le soleil.
Pendant que Hector faisait la sieste à côté de lui.
En jouant à ramasser les cailloux et à les mettre dans les mains de Papi-Mamie.
À l'occasion d'une halte sur le chemin du retour.

Et surtout, aujourd'hui, c'était sur la tombe de sa sœur.

Réflexion

24 mai 2015

24

Mon "bébé de droite" devenait un petit garçon.
Mon "bébé de gauche" devenait une petite fille.
Seul mon mari devait connaître le sexe des grumeaux avant leur naissance. Mais l'échographiste, après avoir commencé par le bébé de droite et après en avoir révélé le sexe à mon mari à l'abri de mes yeux et de mes oreilles, avait pensé à voix haute, toute concentrée qu'elle était sur ce qu'elle était en train de découvrir et de comprendre : "Pour la petite fille, c'est plus compliqué", avait-elle gaffé, d'un air sérieux. Une phrase, quatre informations : ce bébé est une petite fille, l'autre bébé est un petit garçon, ce bébé ne semble pas aller bien, l'autre bébé semble aller bien.

Mon "bébé de droite" devenait Gaspard.
Mon "bébé de gauche" devenait Élise.
Les prénoms de nos bébés étaient déjà choisis en fonction des trois "combinaisons" de sexes possibles. Mais nous ne devions les appeler par leurs prénoms qu'à leur naissance.

Mon "bébé de droite" restait un bébé a priori en bonne santé.
Mon "bébé de gauche" devenait effectivement un bébé malade, malformé, anormal.
Dans tous ces qualificatifs devenus indissociables d'Élise, il y a le mot "mal". Ne pas être en bonne santé, c'est mal. Ne pas être correctement formé, c'est mal. Ne pas être dans les normes, c'est mal. De là à dire qu'Élise était l'incarnation du Mal, que le Mal était en elle...

Tout cela s'est passé un 24 mai. Le 24 mai 2013. Il y a 24 mois.

18 mai 2015

Vains

Il y a vingt mois, tu n'étais pas encore née mais déjà décédée.
Il y a vingt mois, tu n'étais plus vivante mais encore dans mon ventre.

Vingt mois sans toi.
Vains mois sans toi.

17 mai 2015

Petites violences ordinaires

Je sais que j'ai la chance qu'Élise compte pour ceux qui comptent pour moi mais ça ne me suffit pas. Je ne veux pas qu'elle existe à moitié, selon le contexte ou l'interlocuteur. Je veux qu'elle existe partout, tout le temps, avec tout le monde.

Pas comme avec ce couple rencontré au mariage d'amis communs, auquel nous avons assisté avec Gaspard et Hector. Alors que nous discutions de banalités (vous faites quoi dans la vie, vous venez d'où, etc.), mon mari résume notre couple en quelques chiffres : "Dix ans d'amour, huit ans de mariage et ...". Devinant de quoi mon mari allait alors parler, cette jeune femme a jugé bon de compléter elle-même : "et deux enfants". Alors même que nous venions de parler d'Élise. J'ai corrigé immédiatement mais elle n'a pas réagi.

Pas comme avec cette bénévole associative rencontrée à l'occasion d'un atelier de portage. Alors qu'elle remplissait une fiche de renseignements me concernant en vue de mon adhésion à l'association (dont la mission principale est le soutien de l'allaitement maternel), elle me demande combien j'ai d'enfants : "Trois dont un décédé". Et elle de me répondre sans vergogne : "Je note deux alors". Ma fille ne peut pas être allaitée ni portée alors elle ne compte pas pour ta p..... d'association, c'est ça ?! Mais je n'ai rien dit, je me suis contentée d'un "Hmmm" qu'elle a dû prendre pour une forme d'approbation.

Pas comme avec la kiné chez qui je fais ma rééducation périnéale post-Hector et chez qui j'avais également fait celle post-grumeaux. Elle connaît déjà Gaspard puisque je l'emmenais avec moi lors de mes séances l'an dernier. Elle a maintenant rencontré Hector puisque je l'emmène également avec moi. Et à défaut de connaître Élise elle-même, elle connaît son existence. Cela ne l'a pas empêchée de me demander, le sourire aux lèvres, sans doute fière de sa petite blague : "Deux garçons ! Vous ne vouliez pas de petite fille ?". Aussi spontanément que posément, je lui réponds qu'ils ont en réalité une sœur, m'apprêtant à lui rafraîchir la mémoire. Et elle de répondre du tac au tac : "Oui, oui, avec Gaspard, vous m'aviez dit". Si tu te souviens d'elle, pourquoi tu fais comme si elle n'existait pas alors ?! 

Réflexion

Quand je revendique l'existence d'Élise, quand je milite pour la reconnaissance du deuil périnatal, je veux bien admettre que les gens n'aient pas forcément envie d'aller sur ce terrain-là. Mais quand je me contente de parler d'elle et de décrire ma famille telle qu'elle est, pourquoi me refuse-t-on ce droit ?!

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4 mai 2015

Je veux

Peut-être est-ce à cause du mauvais temps ou du retour de vacances - ou un peu des deux - mais je me sens déprimée ce soir. Et comme toujours, quand je déprime (ou plus), je pense à toi. Alors j'ai regardé des photos de toi. Il y a longtemps que je n'avais pas eu besoin de le faire, d'ailleurs.

Et en regardant à nouveau ces photos, je me suis dit plein de choses.

Je veux te prendre encore dans mes bras.
Je veux t'entendre rire aux éclats.
Je veux te murmurer à l'oreille que je t'aime.
Je veux te présenter ton petit frère.
Je veux te voir trébucher et te faire tes premières égratignures aux genoux.
Je veux te serrer à nouveau contre mon cœur.
Je veux t'écouter parler sans qu'on n'y comprenne rien.
Je veux lire la joie de vivre dans tes yeux.
Je veux goûter à la chaleur de tes câlins.
Je veux t'entendre te chamailler avec tes frères.
Je veux caresser la douceur de tes cheveux.
Je veux que tu me réveilles la nuit ailleurs que dans mes cauchemars.
Je veux qu'on reprenne ta vie et la nôtre là où elles ont commencé à basculer.
Je veux qu'on efface tout et qu'on recommence.
Je veux que tu me pardonnes et que tu me donnes une seconde chance.
Je veux que tu reviennes et qu'on fasse comme si de rien n'était.

Réflexion

30 avril 2015

Même en Corse

Nous passons nos premières vacances à quatre en Corse, l'un des plus beaux endroits que je connaisse.

Hier, nous avons visité la citadelle de Calvi, notamment la cathédrale Saint-Jean-Baptiste. À une époque où je ne savais pas encore si j'étais croyante ou non, ma mère et moi avions allumé un cierge pour mon grand-père ; il était décédé peu après. Depuis, indépendamment du fait que je sais maintenant que je ne crois pas en Dieu, je n'ai plus allumé de cierge ou de bougie pour personne. Jusqu'à Élise. Je ne l'ai pas fait pendant la grossesse des grumeaux mais après le décès d'Élise, dans les rares occasions où je me suis trouvée dans une église, comme ce fut le cas hier. C'est mon mari, sans rien dire, qui en a pris l'initiative cette fois. Entre le moment où je me suis aperçue de ce qu'il avait l'intention de faire et le moment où il a allumé cette bougie, nous nous sommes simplement regardés, nous ne nous sommes pas parlé. Il savait que je savais. C'est ce genre de geste qui me rassure sur ce qui nous rassemble et nous fait avancer main dans la main, même si nous n'avançons pas tout à fait au même rythme.

Aujourd'hui, à la fin d'une promenade dans des jardins botaniques, nous avons quitté les lieux en même temps qu'une dame accompagnée de sa fille handicapée mentale. Je les ai observées toutes les deux, sans cette curiosité malsaine qu'on éprouve parfois devant ce qui fait peur et qu'on est bien content de ne pas avoir chez soi, mais avec une certaine forme d'envie et beaucoup de regrets. Je sais pourtant que, même si nous n'aurons jamais aucune certitude sur l'état dans lequel Élise se serait trouvée si nous l'avions laissée vivre, elle n'aurait probablement pas pu en faire autant que cette jeune fille, qui pouvait marcher seule, respirer sans assistance, s'exprimer - même de façon presque incompréhensible, qui était même capable d'apprécier la douceur et la saveur d'une glace sous le soleil corse...
En voyant cette jeune fille, je me suis demandé si elle était née "comme ça", si sa mère avait su pendant la grossesse qu'elle serait "comme ça", si elle avait choisi de la garder quand même. Je me suis demandé, dans l'hypothèse où elle n'aurait pas eu le choix, si elle aurait aimé l'avoir, ce choix, et si elle aurait fait le choix de la garder ou non, avec toutes ces années de recul.
En voyant cette femme, je l'ai admirée instantanément. Pour sa détermination - à ne pas faire de sa fille une paria ou une pestiférée qui ne peut pas vivre comme tout le monde. Pour sa patience - à expliquer des choses à sa fille qu'elle doit lui répéter à longueur de temps. Pour son humour - à plaisanter sur les absences et les errances de sa fille. Pour sa force - celle que je n'ai pas eue...

Pour terminer la journée, nous sommes allés sur la plage d'Ostriconi, simplement pour la beauté du paysage. Et nous avons demandé à Gaspard de ramasser un caillou, à défaut de coquillage. Nous savons bien qu'il n'a pas compris que c'était pour la tombe de leur sœur mais nous tenions à cette symbolique. Et nous avons nous-mêmes ramassé un autre caillou. Ils viendront compléter la "collection" commencée l'an dernier en Bretagne.

image

30 avril 2015

Je vais être tata...

Billet publié après mais rédigé avant la naissance de ma nièce

 

... je devrais plutôt dire "Je suis tata" car l'enfant de mon frère et ma belle-sœur, qui doit arriver très prochainement, fait évidemment déjà partie de la famille, quoi qu'il arrive.

Quand mon frère et ma belle-sœur nous ont annoncé la bonne nouvelle, j'ai sauté de joie - littéralement. Parce que j'étais ravie pour eux, ravie que ça ait marché rapidement, ravie de devenir tata.

Quand mon frère et ma belle-sœur nous ont annoncé le sexe de leur enfant, j'ai eu la gorge nouée. Parce que c'est une fille.
Cela fait d'ailleurs écho à l'une des premières phrases que j'ai dites à mon mari quelques minutes après la naissance de Hector : "je suis contente que ce ne soit pas une fille". C'est un peu absurde car nous savions déjà que ce troisième enfant serait un deuxième garçon mais, en le voyant, en le touchant, en l'ayant dans mes bras, je me suis sentie encore plus soulagée de ne pas devoir accueillir une petite fille juste après Élise.

Quand mon frère et ma belle-sœur nous ont annoncé, suite à la dernière échographie, que tout allait bien, j'ai pleuré. Parce que j'étais jalouse. Jalouse de ne pas avoir pu dire ça pour ma fille.
Une idée terrible m'a traversé la tête ce jour-là : j'aurais voulu que tout n'aille pas bien. Je ne leur souhaite, ni à eux, ni à leur fille, aucun mal évidemment. Mais j'aurais juste voulu que l'un des êtres qui comptent le plus pour moi puisse s'approcher au plus près de ma douleur, pour la comprendre et la partager. J'aurais voulu ne plus être seule dans cette douleur.

Ces derniers jours, j'appréhendais un peu mieux l'arrivée de cette petite fille dans notre famille mais j'étais persuadée que sa naissance ne serait pas évidente pour moi. Maintenant qu'elle est sur le point de débarquer, je vois bien que je ne me suis pas trompée. Quand mon frère nous a appris qu'il ne s'agissait plus que d'une question d'heures, ma réaction a été la même que lors des deux premières annonces, en l'espace de quelques secondes au lieu de quelques mois : d'abord la joie et l'impatience, puis immédiatement la gorge serrée et les larmes.

J'ai maintenant hâte qu'elle soit là, dans les bras de ses parents, vivante et en bonne santé.
Et, égoïstement, je voudrais faire un bond en avant de quelques jours ou semaines, vers ce moment où j'aurai dépassé tout ce que sa naissance réveille en moi. Même si je sais que d'autres étapes de sa vie ne manqueront pas de réveiller d'autres choses en moi, comme un écho silencieux par rapport à Élise, puisque ce sera elle la vraie première petite-fille de la famille...

Réflexion

15 avril 2015

Franck

Franck, c'est le sage-femme qui s'est occupé de nous le 18 septembre 2013 et le 9 février 2015. Un pur hasard, une heureuse coïncidence, le destin qui se trouve pris de remords ? Peu importe. Nous avons été heureux de croiser sa route il y a bientôt 19 mois et de la croiser à nouveau il y a un peu plus de 2 mois.

Franck, c'est cet homme qui exerce un "métier de femme", auprès des femmes.
Franck, c'est celui qui sait se montrer à la fois présent et discret, impliqué et pudique, rassurant et respectueux.
Franck, c'est celui qui sait trouver les mots ou le silence qu'il faut quand il faut.
Franck, c'est celui qui connaît notre histoire et sait quoi en faire.
Franck, c'est celui que le destin a mis sur notre chemin pour deux des dates les plus importantes de notre vie.
Franck, c'est celui qui fait partie de notre histoire et de l'histoire de nos enfants.
Franck, c'est l'un de ceux qu'Élise a entendus en dernier avant de mourir.
Franck, c'est l'un de ceux que Gaspard a entendus en dernier avant de naître.
Franck, c'est celui que Hector a vu en premier.

Je me souviendrai toute ma vie de la douceur et du respect avec lesquels Franck s'est occupé de moi, de mon mari, d'Élise et Gaspard, de ses gestes rassurants, de ses yeux remplis d'empathie.

Je me souviendrai aussi toute ma vie des regards que nous avons échangés avec Franck à l'instant où Hector est né, des plaisanteries que nous avons partagées avec lui pendant l'accouchement, de son regard complice lorsque j'ai dit à Hector qui venait de naître qu'il était aussi brun que sa sœur.

Rien que de repenser aux moments si forts, si intenses que nous avons partagés avec lui m'émeut aux larmes. Je suis tellement heureuse d'avoir recroisé sa route.

merci

Mon seul regret, c'est de n'avoir pas osé lui demander de faire une photo de ou avec lui au moment où nous nous sommes quittés dans la nuit du 9 au 10 février 2015, moi dans le lit, Hector dans son berceau, mon mari à côté de moi et lui sur le pas de la porte de la chambre. Regret que je nourrissais chaque jour jusqu'à ce 14 février où j'ai eu la joie de découvrir (grâce à une amie qui m'a transmis l'information) qu'il était à l'honneur dans un reportage diffusé sur M6. Grâce à cette vidéo, nous pourrons garder une image de lui ; mieux, nous pourrons même nous remémorer sa voix et sa douceur, en écho à ce que nous avons vécu avec lui. Quel réconfort pour nous qui savons si bien que tous les souvenirs finissent par s'effacer, même les plus beaux, même les plus précieux...

15 avril 2015

La laisser s'envoler

Je me suis toujours considérée comme plutôt équilibrée et pas trop mal dans mes baskets (adolescence mise à part mais quoi de plus banal ?) alors je ne me serais jamais imaginé dire ça un jour mais la vie a décidé de contrarier mes plans : "je vois une psy". Les plus fidèles d'entre vous le savent déjà : depuis la découverte des malformations d'Élise, nous sommes suivis (surtout moi, ces derniers mois) par la psychologue de la maternité où j'ai accouché. Et je l'ai revue il y a deux semaines, justement. Je l'avais appelée lorsque je n'allais pas bien par rapport à Hector mais elle ne pouvait pas me recevoir avant début avril. Lorsque j'ai pris rendez-vous, je pensais lui parler surtout de Hector et moi ; en réalité, les choses étant redevenues quasiment normales entre Hector et moi entre-temps, c'est surtout d'Élise qu'il a été question.

Réflexion

Et le constat n'est pas glorieux puisque, quatre mois plus tard, il est identique à celui de novembre.
Voici en vrac ce qui est ressorti de ce nouveau rendez-vous :

  • Je n'arrive pas à lâcher le petit ballon d'Élise, à le laisser s'envoler ; je m'accroche désespérément à sa ficelle.
  • Élise n'est encore que douleur et tristesse. Mais comment peut-il en être autrement ? Comment peut-on ne pas - ne plus - souffrir de la mort de son enfant ?
  • En associant Élise à autre chose que la douleur et la tristesse, j'aurais l'impression de la trahir.
  • Je rame à contre-sens, comme si je ramais vers elle alors qu'elle devrait être le souffle qui me pousse en avant.
  • Je n'accepte pas que la place d'Élise ne soit pas la même que celle de Gaspard et Hector.
  • Ma réalité ne correspond pas à la réalité que me renvoient les autres : là où je me sens maman de trois enfants, on me dit que je suis maman de deux enfants.
  • J'ai l'impression de tenir la ficelle du ballon d'Élise toute seule, pour tout le monde, mais si ce n'est pas moi qui le fais, qui le fera ? À cela, "ma psy" répondrait : y a-t-il besoin que quelqu'un tienne cette ficelle ?

Renoncer
Je me souviens d'une phrase prononcée par un papa (qui a perdu son fils il y a plus de 6 ans) lors du dernier groupe de parole de l'association Nos tout-petits auquel j'ai assisté, en décembre dernier : "Accepter, c'est renoncer". Accepter la mort de son enfant, c'est renoncer : renoncer à la vie qu'on avait imaginée, à la famille qu'on avait espérée, aux projets qu'on avait rêvés, à la personne qu'on était. Et c'est bien ça mon problème - ou plutôt l'étape que je n'ai pas franchie, que je n'arrive pas à franchir : je n'ai pas renoncé. Je n'ai pas renoncé à "tout ça" alors que maintenir l'illusion que "tout ça" est encore possible est absolument absurde, vain, vide de sens.
Lors de ce même groupe de parole, une autre maman s'étonnait (sans jugement, sans reproche) de ce que je persistais à faire vivre, à faire exister Élise au quotidien, de ce que je n'acceptais pas qu'Élise ne soit pas intégrée à notre vie de tous les jours, comme Gaspard et aujourd'hui Hector. Je crois qu'on en revient exactement à la même chose : le renoncement, que je n'ai pas encore atteint.
En d'autres termes, je n'accepte pas la vie d'Élise telle qu'elle est, telle qu'elle a été. D'une certaine façon, je l'attends encore, je n'ai pas tout à fait compris, accepté, intégré, admis que c'était fini. Je ne veux pas que ce soit fini. Je ne veux pas qu'Élise ne se conjugue qu'au passé alors qu'elle est si présente en moi.
Quand j'aurai franchi cette étape, je crois que j'aurai fait un grand pas et que je ne pourrai plus reculer. Mais je ne sais pas encore quand, comment ni à quel prix j'y arriverai.

Le début du renoncement, ce sera peut-être quand je réussirai, entre autres, à :

  • changer l'image de profil de mon compte Facebook personnel, qui est toujours la même depuis plus de 18 mois : le faire-part de naissance officieux des grumeaux,
  • dire de Gaspard qu'il est "mon premier" ou "mon aîné",
  • changer le fond d'écran de mon portable, qui est toujours le même depuis plus de 18 mois : les empreintes de pieds d'Élise,
  • arrêter de préciser "vivants" quand je dis que mon mari et moi voulons quatre enfants.
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Tannabelle et ses grumeaux
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