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Tannabelle et ses grumeaux
   
"Livre-lui tes pensées. Des pensées que tu ne dis pas, ce sont des pensées qui pèsent, qui s'incrustent, qui t'alourdissent, qui t'immobilisent, qui prennent la place des idées neuves et qui te pourrissent. Tu vas devenir une décharge à vieilles pensées qui puent si tu ne parles pas."
Oscar et la dame rose - Éric-Emmanuel Schmitt
   
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20 mars 2014

Pierre après pierre

Je ne sais pas pour vous mais, quand il fait beau, j'ai envie que les choses soient en ordre et à leur place. Alors aujourd'hui, le soleil printanier aidant, j'ai fait un peu de tri et de rangement, en particulier sur l'ordinateur. J'ai notamment fait le ménage dans tous les favoris Internet.

Je ne vous cache que ça m'a fait drôlement mal au cœur de supprimer tous les liens que j'avais mis de côté en début de grossesse, sur les poussettes doubles et l'allaitement de jumeaux en particulier.
Dans le lot, il y avait aussi tous ces liens sur les fentes labio-palatines, sur la dilatation ventriculaire, sur l'interruption de grossesse.
Et puis il y avait les liens de repérage vers les seuls vêtements d'Élise.

Tout cela est derrière nous.
Je suis restée sur ma simple envie, non assouvie, d'allaiter mes jumeaux.
Nous avons dû nous contenter d'une poussette simple.
Nous savons qu'une fente labio-palatine peut s'opérer et se réparer, même de façon imparfaite.
Nous connaissons les enjeux et les impacts de la dilatation ventriculaire.
Nous vivons dans notre chair et dans notre cœur le drame de l'interruption de grossesse.
Nous avons un double de la robe grise et du body qu'elle porte.
Mais ce qui n'est pas derrière nous, c'est le manque d'elle, son absence, le vide qu'elle a laissé.

Une nouvelle pierre - un nouveau petit caillou, plutôt - à l'édifice du deuil, sans doute.
Une nouvelle page qui se tourne. Parce qu'il faut bien tourner les pages pour que l'histoire puisse continuer à s'écrire, malgré son absence, avec son absence, avec elle quand même.

Derrière soi

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13 mars 2014

Aller mieux

e soir, au groupe de paroles, une maman disait qu'après le décès de son enfant, elle n'avait pas voulu de "bébé-pansement" : elle ne voulait pas faire un bébé pour aller mieux, elle voulait aller mieux pour faire un bébé. J'ai réagi à ce qu'elle disait, sans jugement, sans comparaison, juste parce que je comprenais ce qu'elle voulait dire, précisément parce que je n'ai pas eu ce choix-là. Le "bébé-pansement" est arrivé au moment où mon autre bébé est parti. Et c'est ça qui est compliqué.

Tout le monde dit qu'il faut du temps pour se reconstruire, que le chemin du deuil est long. Mais j'ai l'impression qu'avec notre cas particulier, le temps s'étire, le chemin est encore plus long, le deuil prend du retard. J'ai l'impression de "faire mon deuil" en pointillés, de ne vivre mon deuil que quand Gaspard n'a pas besoin de moi. J'ai l'impression que chaque étape prend plus de temps que ce qu'elle aurait pris si Élise avait été seule. En même temps, si Élise avait été seule, Gaspard n'aurait pas été là pour me tirer vers le haut. Il me freine tout en me faisant avancer. Un paradoxe de plus.

Réflexion

3 février 2014

Administrations

Le dédale administratif relatif à la naissance sans vie de son enfant a de quoi en déboussoler plus d'un... Même si je comprends la plupart de ces règles, cette confusion n'aide pas à déterminer la place de son enfant, que ce soit dans sa tête, dans son corps, dans sa famille ou dans la société.

 

Pour le versement de la prime de naissance, Élise compte parce que l'accouchement a eu lieu après le premier jour du mois civil qui suit le cinquième mois de grossesse.

Pour le versement des allocations familiales et l'éligibilité à un congé parental de trois ans, Élise ne compte pas parce qu'elle n'est pas "à notre charge", ce que je comprends parfaitement.

Pour l'inscription à l'état civil, Élise compte à moitié parce qu'elle est née sans vie mais après 15 SA; elle ne figure donc que dans la section "Décès" de notre livret de famille et Gaspard est donc considéré comme notre deuxième enfant.

Pour la sécurité sociale, Élise compte parce qu'elle est née sans vie mais viable, c'est-à-dire après 22 SA et avec un poids supérieur à 500 grammes ; j'ai donc droit à un congé post-natal pour jumeaux et la durée de mon prochain congé maternité sera calculée sur la base de deux premiers enfants viables.

Pour les impôts, Élise compte provisoirement. Elle a le droit de figurer sur notre déclaration de revenus pour l'année 2013. Mais elle ne figurera pas sur notre déclaration de revenus pour l'année 2014, ni pour toutes les années suivantes.

Enfants nés sans vie et impôts

Pour le calcul de la retraite, Élise compte en partie ; j'aurai donc droit à la prise en compte d'un trimestre d'assurance pour la naissance - même sans vie - d'Élise.

 

Et si je dois remplir un jour une feuille de soins pour Gaspard, je mets quoi dans cette case ?

Feuille de soins

 

30 janvier 2014

En haut de la montagne

Depuis les fêtes, le moral n'est pas très haut mais ces derniers temps, il l'était encore moins sans que je m'explique vraiment pourquoi. Et puis j'ai compris. J'ai compris que c'est parce que l'on s'approche de tous ces "il y a un an". J'ai souvent lu que la première année après la perte de son bébé est la plus difficile parce que c'est la première fois que l'on repasse par toutes "ses" dates... Je crois que c'est vrai. Je vous dirai ça dans un an.

En attendant, il ne faut pas m'en vouloir si je vous parle beaucoup de 2013. En 2014, ce sera la première fois depuis la grossesse et depuis le décès d'Élise que je repasserai par toutes les dates qui ont marqué 2013, que je revivrai le changement de saison, que je repenserai aux étapes de la grossesse.

 

Aujourd'hui, nous sommes le 30 janvier 2014.

 

Il y a un an, débutait pour de vrai ma première grossesse. Ironie de la vie : aujourd'hui, nous nous rendons à nouveau à l'hôpital pour participer à une rencontre "parents-bébés" organisée par la sage-femme qui nous a préparés à la naissance. Une façon de boucler la boucle, diront certains.

Nous aurions pu choisir de ne pas y aller, pour ne pas affronter ces couples, ces mamans à qui nous n'avions rien dit pendant la grossesse. Mais, depuis le début, nous nous efforçons de vivre comme si Élise était là aussi, de faire les choses qu'on aurait faites s'ils avaient été là tous les deux. Nous n'avons pas honte de notre fille alors pourquoi la cacher ? Et puis c'est aussi une façon de la faire exister et reconnaître, une motivation sans faille pour continuer à avancer.

Aujourd'hui, nous allons donc présenter Gaspard et Élise. Pour Gaspard, c'est son sac à langer que je prépare ; pour Élise, c'est son livre. Une seule différence mais quelle différence...

 

Il y a un an, nous étions au comble de l'impatience, de l'espoir, de l'excitation. C'était le jour du "replacement", comme on dit : le replacement du ou des embryons qui se seraient formés suite à la fécondation in vitro réalisée deux jours plus tôt.

Lors de la première FIV, en décembre 2011, un seul embryon s'était formé ; il avait pu être replacé mais n'avait pas tenu.

Lors de la deuxième FIV, en juin 2012, aucun embryon ne s'était suffisamment formé pour pouvoir être replacé. Mais ça, nous ne l'avions su qu'au dernier moment, alors que nous étions déjà en route vers l'hôpital pour le replacement.

Lors de cette troisième FIV, nous avons su le lendemain de la ponction que huit embryons s'étaient formés. Le matin du replacement, il y a un an, nous savions bien que rien n'était encore gagné mais nous étions confiants : sur les huit embryons qui avaient émergé la veille, il y en aurait bien au moins un qui aurait tenu jusqu'à l'heure fatidique du replacement. Et puis on nous a annoncé qu'il y avait deux embryons qui étaient vraiment bien formés, "au-dessus du lot". Je me souviens très bien des images qu'on nous a présentées : deux amas de quatre cellules, joliment dessinées, régulièrement formées. Je ne sais pas qui était qui mais c'étaient déjà eux.

Il y a un an, c'est l'espoir de devenir maman de jumeaux que l'on a replacé en moi avec ces deux embryons.

On a signé les papiers autorisant le replacement de deux embryons et on est repartis le coeur allégé par l'espoir et alourdi par la crainte d'un nouvel échec.

Voilà, chez nous, c'est comme ça qu'on fait les bébés : on n'a pas besoin de faire de câlins, il suffit d'obéir aux sages-femmes, d'être gentil avec les médecins, de signer des papiers et d'attendre. Et peut-être devrons-nous en repasser par là puisque les six autres embryons de cette troisième FIV n'ont finalement pas pu être congelés.

 

Ce replacement ne devrait être qu'un bon souvenir. C'en est un, mais il a un goût amer, celui que prennent les choses quand on sait que l'histoire ne se finit pas bien, quand on sait qu'il n'y a pas vraiment de happy end. Bien sûr, Gaspard est là, en pleine forme et en bonne santé, pour notre plus grande joie mais je ne peux pas dire que l'histoire se soit bien finie. Ce souvenir n'a pas la saveur des évènements dont on sait qu'ils resteront teintés d'une joie pure. Ce replacement, c'est un peu comme le sommet d'une montagne : aujourd'hui, quand je pense à ce 30 janvier 2013, je me vois tout en haut de la montagne mais je vois aussi la pente vertigineuse à laquelle je tourne encore le dos.

Précipice

21 janvier 2014

Des mots qui résonnent

Beaucoup de choses que je lis ou entends résonnent en moi différemment maintenant.

 

Comme dans cette interview de Mélissa Theuriau à propos de sa participation à "Rendez-vous en terre inconnue" chez les Massaï :
Mon rapport à la collectivité a changé. Voir qu'ils ne peuvent pas être heureux si tout le monde n'est pas heureux, c'est une leçon de vie fabuleuse.
C'est un peu (beaucoup) comme ça dans notre famille proche...

Rendez-vous en terre inconnue - Mélissa Theuriau - Massaï

 

Comme dans cette interview d'Églantine Émeyé à propos du documentaire "Mon fils, un si long combat" qu'elle consacre à son fils handicapé et autiste :
Je comprends cette peur car le handicap est une inconnue pour beaucoup. Alors je me suis dit : "Montrons-le."
C'est un peu (beaucoup) ce que je me dis par rapport à Élise et au deuil périnatal à travers mon blog.

Églantine Émeyé - Mon fils, un si long combat

 

Comme ce descriptif d'un épisode de la série documentaire "Baby boom" :
FIV, grossesse tardive ou handicap à surmonter : qu'importe les obstacles ou les coups du sort, il y a des pères et des mères qui ont tout surmonté pour tenir dans les bras leur bébé.
Sauf que certains obstacles ou coups du sort restent insurmontables et que certains bébés ne seront jamais bercés par leurs parents...

Baby boom

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15 janvier 2014

Psychologie et psychologie

Hier, alors que j'expliquais l'histoire de mes jumeaux, on m'a sorti : "De toutes façons, des faux jumeaux, c'est pas comme des vrais. Regarde, mon faux jumeau et moi, on ne s'entend pas."
Ah bah ça me rassure, du coup ! Finalement, c'est beaucoup moins sérieux que ce que je croyais : ma fille n'est pas là et mon fils ne grandira pas aux côtés de sa sœur, mais c'est moins grave puisque c'était seulement sa fausse jumelle !

Cerise sur le gâteau : c'est une doctorante en psychologie qui m'a sorti ça. Si, si.
L'avantage, c'est que je sais que je ne me ferai jamais suivre par elle.

7 janvier 2014

Ça + ça + ça

Ce soir, pour ma reprise de l'orchestre, sur le trajet jusqu'à l'école de musique où nous répétons, j'ai entendu à la radio :

Le premier jour du reste de ta vie d'Étienne Daho

Je me suis effondrée instantanément.

Cette chanson, je l'ai entendue le jour de mon dernier concert, avant que je n'arrête temporairement la musique pour la grossesse.
C'était aussi et surtout le jour où j'ai appris que j'étais enceinte.
C'est le titre de cette chanson qui a été repris par le film qui nous a inspiré notre faire-part officieux.

Trop de coïncidences pour que ça en soit une...

Merci ma poupée de m'avoir envoyé ce signe... <3

Le premier jour du reste de ta vie

5 janvier 2014

La tête dans les étoiles

Beaucoup de parents désenfantés s'appellent eux-mêmes des "paranges", des "mamanges", des "papanges". Cette symbolique de l'ange ne nous parle pas.
Pour nous, Élise est une étoile filante et Gaspard est une étoile.

Sans vraiment le chercher (peut-être un peu quand même inconsciemment), nous sommes attirés par les étoiles... Sans refaire notre intérieur, nous saupoudrons notre vie de quelques poussières d'étoiles...

Étoile filante étoiles

3 janvier 2014

Il y a...

Dans sa boîte à souvenirs, sur un morceau du même tissu qui a servi à l'étagère de Gaspard, il y a...

  • une photo d'elle avec la grenouille que ma maman lui a tricotée et les chaussons que je lui avais tricotés
  • un doudou-ours brodé à son prénom et offert par des amis de mes beaux-parents
  • un doudou-lapin brodé à son prénom et sa date de naissance offert par le parrain de mon mari et son épouse
  • un kaléidoscope rempli d'étoiles offert par la cousine de mon mari et son époux
  • le papillon décoratif qu'il y avait parmi les premières fleurs posées sur sa tombe
  • le petit écriteau décoratif avec son prénom qu'il y avait parmi les premières fleurs posées sur sa tombe
  • le double de son bracelet de naissance
  • la même étoile que nous avons posée tout en haut de notre sapin de Noël et que nous avons offerte à nos parents, frères et belle-sœur pour leurs sapins de Noël
  • une branche de bruyère et un caillou de la première composition florale que nous lui avons déposée
  • l'enveloppe avec ses empreintes prises peu après sa naissance
  • l'album Starmyname à son prénom - le même que son frère
  • les cartes qui lui sont adressées : mon frère et ma belle-sœur, une amie de mes beaux-parents, une amie et son époux, le cousin de ma mère, son épouse et sa fille
  • un exemplaire du faire-part
  • le journal municipal de notre ville où elle et son frère figurent dans la rubrique Naissances
  • le body que la tante de mon mari avait acheté pour elle avant que l'on ne sache qu'elle ne viendrait pas au monde vivante
  • la pochette dans laquelle se trouvait le bracelet-étoile que mon mari m'a offert à Noël "au nom d'Élise"
  • la boule à neige-ange que des amis nous ont offerte
  • une rose séchée du jour de son enterrement
  • le coffret des pompes funèbres avec ce qui me relie au jour de son enterrement, ce 23 septembre : les cartes qui accompagnaient les fleurs, mon autorisation de sortie provisoire de l'hôpital, les tickets de péage, le texte qui a été lu
  • ses petites Converse - les mêmes que son frère
  • le courrier que nous avons reçu de la part du PDG de l'entreprise de mon mari et qui mentionne aussi bien Élise que Gaspard
  • le DVD des photos d'Élise en salle de naissance
  • le sac plastique rayé blanc et bleu dans lequel sa grenouille a patienté cet été en attendant de la rejoindre et que je n'ai pu me résoudre à jeter
  • le double des vêtements qu'elle porte : un body blanc, une robe gris clair avec de petites étoiles blanches brodées, une culotte assortie à sa robe, des soquettes blanches, les chaussons roses apportés par ses grands-parents paternels et le bonnet rose tricoté par sa grand-mère maternelle
  • le bonnet rayé blanc et gris tricoté par ma mère, qu'elle portait à sa naissance, qu'elle portait lors de l'autopsie, qui porte des traces de son sang et que je ne laverai jamais

Et toute ma vie je continuerai à remplir sa boîte, avec tout ce qui me fera penser à elle...

boîte à souvenirs

30 décembre 2013

St Gaspard

Samedi, nous étions le 28 décembre, jour de la Saint-Gaspard. Pour fêter cela, nous sommes allés boire un verre dans le salon cosy d'un hôtel quatre étoiles que nous aimons particulièrement, près de là où est enterrée Élise. Nous verrons où nous nous trouverons les prochains 28 décembre mais j'aimerais instaurer ce rituel de passer un moment privilégié dans un endroit agréable...

Alors que j'avais Gaspard dans les bras, une dame s'est approchée de nous avec sa petite fille pour lui montrer qu'elle aussi avait été si petite. Lorsqu'elles ont finalement passé leur chemin, nous l'avons entendue appeler sa petite fille qui s'éloignait un peu trop : "Élise ! Élise !". Un signe de plus, sans doute.

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